- La pluriactivité, une spécificité montagnarde ?
En 1985, le législateur précise dans l’article 59 de la loi montagne que "les travailleurs pluriactifs bénéficient d’une protection sociale qui prend en considération les conditions particulières dans lesquelles ils exercent leurs activités professionnelles". Afin de "préserver les intéressés des excès de complexité que peut engendrer la pluralité des régimes de protection sociale dans les zones de montagne (...), les organismes de sécurité sociale mettent en place des guichets uniques d’information et de conseil destinés aux travailleurs pluriactifs".
En mars 1991, Mme Lise Casaux soutient une thèse intitulée "La pluriactivité : étude juridique et pratique", à l’Université des Sciences Sociales de Toulouse.
La même année, en novembre, le Comité Interministériel d’Aménagement du Territoire (CIAT) décide "de favoriser la pluriactivité dans certaines zones comme un impératif de survie et comme un enjeu majeur d’aménagement du territoire".
Et dès 1993, M. Gaeremynck, dans ses "Propositions pour faciliter l’exercice de la pluriactivité dans le monde rural", souligne certaines difficultés de la pluriactivité en milieu agricole en matière fiscale et sociale et soutient le grand intérêt de simplifications dans chacun des domaines concernés.
- Le concept de pluriactivité s’ouvre à tout le territoire
En 1994, M. Hervé Gaymard, Député de la Savoie, dans un rapport intitulé "Pour le droit à la pluriactivité : propositions au Premier Ministre" ouvre la notion de pluriactivité à l’ensemble de l’activité économique en général et à "toutes les catégories socioprofessionnelles, toutes les formes d’emploi (salarié, indépendant, libéral, etc.) et tout le territoire".
En 1996, M. Daniel Caron, Inspecteur de l’agriculture, dans un rapport interministériel, fait état des difficultés liées au "concept d’activité unique" qui prévaut dans l’ensemble des secteurs d’activités privées. Il souligne d’autre part que "le monoactif souhaite sauvegarder les avantages sociaux et fiscaux acquis et le pluriactif espère en obtenir la quote-part que son activité dans le dit secteur lui permet de revendiquer au nom de l’équité".
- Une étude fondatrice : la pluriactivité trouve sa définition
Aude Benoît et Françoise Gerbaux, de l’Université de Grenoble II, travaillent sur le sujet en 1997 et publient "La pluriactivite : pratiques sociales et réponses juridiques".
Elles confirment le fait que la pluriactivité n’est plus cantonnée au monde rural puisque "près des deux tiers des pluriactifs n’ont aucun revenu agricole". Tous les statuts sociaux sont concernés puisque "86% des pluriactifs associent salariat et non-salariat" et que "25% des non salariés sont pluriactifs".
Désormais, la pluriactivité se définit comme l’exercice de plusieurs emplois ou activités professionnelles assurés de façon successive ou simultanée dans l’année par un seul individu.
La pluriactivité peut être un pis-aller comme elle peut être voulue, réfléchie et organisée. Pour en faciliter l’exercice, des changements sont indispensables. Les progrès sont lents : ainsi, le guichet unique de protection sociale prévu pour octobre 1997 n’a jamais été opérationnel, et l’indemnisation du chômage du pluriactif pose toujours un certain nombre de problèmes.
- La pluriactivité continue de poser question
La notion même de travail a changé ainsi que le souligne le rapport Boissonnat en 1995.
Elle devra être revue au profit d’un "contrat d’activité" qui permettrait de passer plus facilement d’un statut à un autre, d’une activité à une autre. L’avenir est à la construction de parcours professionnels individuels qui nécessiteront dans tous les cas des besoins accrus en formation tant initiale que continue. La pluriactivité s’inscrit dans ce cadre ; elle s’appuie sur des "démarches transversales et intersectorielles" qui vont exiger "une réflexion interministérielle et inter consulaire".
Le concept de "coopératives d’emploi et d’activités" initié à Lyon en 1995 est une réponse concrète au besoin des pluriactifs de structuration de leurs activités et de simplification de leur statut social dans un cadre juridique sécurisé.
En janvier 1999, le rapport du Conseiller d’Etat Anicet Le Pors effectue un état des lieux sur les quelques 420 000 travailleurs saisonniers du tourisme. Ce rapport dénonce l’absence de statut des saisonniers et présente 31 propositions pour améliorer leurs conditions de vie. Parmi ces propositions, certaines encouragent l’exercice de la pluriactivité tel que le contrat de travail intermittent ou la simplification du régime de sécurité sociale.
En 2002, c’est le rapport du sénateur Jean-Paul Amoudry sur "L’avenir de la monatagne, un développement équilibré dans un environnement préservé", qui formule 7 propositions pour "sortir de l’impasse de la pluriactivité". Parmi celles-ci figurent : la participation des personnes publiques aux groupements d’employeurs, l’augmentation du seuil qui permet de rattacher les recettes non agricoles aux recettes agricoles... Ce rapport trouve son prolongement dans le vote, en février 2005, de la loi relative au développement des territoires ruraux.